vendredi 25 novembre 2016

Cette nature "sauvage" qui frappe à notre porte



La nature nous entoure. L'homme l'a modelée patiemment au cours des siècles. Ou violement dans ces dernières décennies. La forêt primaire à Bornéo comme au Brésil laissant la place à la culture intensive du palmier à huile. Une catastrophe écologique sans précédent.
Mais chez nous, quel rapport avons-nous au monde sauvage, faune et flore ?
Les citadins ont besoin de se promener à travers la nature pour se ressourcer. C'est une excellente idée, les chemins de randonnée ont pullulé sur l'ensemble de notre territoire, les GR font recette tout comme les chemins de Saint-Jacques.
La marche à pied est à la mode, GR20, Chemin de Stevenson, Chemin de Régordane, Sentier des douaniers, etc.
L'hommo-sapien-citadicus parcourt la campagne. Il s'ouvre au monde des petites fleurs, comestibles de préférence, vit sa survie dans la nature comme une aventure intrépide ou stimulante, quand ce n'est pas son entreprise qui l'envoie manger des pissenlits autrement que par la racine…je m'égare. Pardon.
Mes amis botanistes, animateurs de stages de pleine nature me pardonneront ce dérapage.
C'est une façon de voir et de parcourir la campagne, de s'imprégner de nature sauvage.

Reste la question de notre rapport au monde sauvage, au-delà de ce tourisme vert. Qu'en disent nos contemporains qui vivent à la campagne ? Ils y sont bien, mais préfèrent que les routes soient déneigées en hiver. Tâche qui incombe maintenant aux communes sur leur territoire hormis les grands axes.
En général, cela se passe bien, pneus neige et équipements spéciaux prennent le relais, les autochtones sont habitués. La neige reste un facteur climatique ponctuel, hivernal auquel on est familier.
C'est dans ces moments d'exception que l'on peut se questionner dans son rapport à la nature. Le matin au réveil tout est blanc. Calme, tapis immaculé de neige… tableau bien particulier qui change notre vision du paysage.
La nature est là à notre porte, météorologique, mais soudaine. Elle nous plonge dans un état bien particulier. Méditatif ou besogneux, car il faut pour sortir, pelleter la neige.
Notre rapport au "monde sauvage" prend toute sa dimension. C'est l'état extraordinaire qui nous met devant notre relation à la nature.
Puis la neige fond, le printemps revient avec ses bourgeons. La nature redémarre.
Nous avons le souvenir des traces dans la neige; Lapin ? Chat ? Ongulé ? Renard ? Martre ? Poules ? Oiseaux ?  etc.
La neige comme révélatrice de cette faune sauvage qui nous entoure. Émerveillement devant ces traces, à moins que ce ne soit un prédateur…et nos réflexes de chasseur reprennent le dessus, surtout si notre poulailler est en danger.
Ainsi nous plongeons instantanément dans notre nature humaine face à celle de la "nature". Le sauvage vient à notre porte, parfois fouiller dans nos poubelles.

Qu'en est-il de la frontière qui s'est établie entre le "sauvage" et notre monde civilisé ?
Comment acceptons-nous sa  présence en parallèle à notre monde ? Et d'abord qui est chez qui ? Lui chez nous, ou nous chez lui ? Historiquement, il était là avant nous. Mais nous avons inversé la tendance, tout du moins dans notre hémisphère et dans notre espace européen. La forêt primaire a disparu, il faut aller aux confins de la Pologne et de l'Ukraine pour trouver des espaces sauvages où le loup, l'ours, le bison sont encore présents, bien que ce dernier soit issu d'un repeuplement.
Dans notre hexagone le problème est clair. Le boisement du 19° siècle a figé des espaces, les parcs naturels du 20° siècle ont parachevés la chose, en dehors nous sommes obligatoirement chez quelqu'un, donc dans un paysage aménagé.
Ainsi comment vivons-nous dans ces espaces frontaliers entre territoire aménagé et espaces "naturels" souvent protégés? Faune et flore ?
Le remembrement, la puissance des tracteurs, l'éradication des haies, l'aménagement de certains cours d'eau, l'asphalte des parkings, le bétonnage de nos côtes…la liste est longue, la "nature" recule, l'espace sauvage se restreint, les animaux sauvages reculent, ou s'adaptent.
Territoire de l'ours des Pyrénées, du loup, qui lui a trouvé temporairement la solution en franchissant le Rhône pour venir jusque dans nos montagnes volcaniques !
Polémiques entre partisans et antis, écolos et agriculteurs, citadins et ruraux… même si la frontière est loin d'être si nette, pardon là encore c'est une caricature provocatrice de ma part !
Et le campagnol, le rat taupier qui laboure les prairies ?
Comment vivons-nous avec eux ? Nuisibles ?
Le renard consomme à lui seul ou avec sa famille en un an, de sept milles à un million de ces petites bestioles qui labourent les pairies. Le nuisible c'est qui ? Et les rapaces qui eux aussi aiment ce campagnol terrestre dans leur alimentation,
en supprimant les haies, certains ont détruit leurs habitats naturels ou leurs lieux de passage protégés.
Nous avons mis du barbelé sur la prairie, mais nous avons aussi fabriqué une frontière mentale entre le monde "sauvage" et le nôtre. Surtout au nom du profit agro-quelque chose.
Le retour à l'équilibre est simple, sous notre nez.
Renouons avec le monde sauvage, laissons-lui sa place et nous en tirerons tous un immense avantage.
 www.alepe48.fr/app/download/.../Renard%20LN%20du%2027%20mars%202015.pdf?t...

mercredi 23 novembre 2016

Automne laborieux.


Vaches d'automne

C'est un moment privilégié pour le promeneur. Les couleurs de la nature nous régalent. Pour peu que vous vous déplaciez d'une région à l'autre, vous pouvez avoir la palette de toutes les couleurs possibles.
Mais c'est aussi le début du retour des bêtes à l'étable. Pour celles qui rentrent. Le temps clément de ces derniers jours retarde ce moment de rentrée. Pas partout, la neige est déjà au rendez-vous et l'hivernage se précise.
Les bêtes restent dehors dans de nombreuses régions. C'est aussi un mode d'élevage, qui même s'il a toujours existé, a tendance à se multiplier. L'infrastructure n'est pas la même et la conduite des bêtes s'en ressent. Il faut des bêtes solides, rustiques, qui s'adaptent bien à ces conditions de vie.
Pour nombre de personnes qui n'ont qu'une approche lointaine de la chose animale, il peut en émerger de l'étonnement; "Pourquoi ne rentre-t-il pas ses bêtes ? Elles vont avoir froid !"
Un petit coup d'œil devrait pourtant apporter quelques réponses. Le pelage de l'animal s'adapte. Chez nous les salers mettent leur poil d'hiver. Le nourrissage est en place, même si cette année il n'a pas beaucoup déserté les pâtures en raison de la sécheresse d'été, elles ne sont donc pas "abandonnées". Bien au contraire c'est dans ces moments-là que l'on peut percevoir la force et la cohésion du troupeau.
Observez comment les bêtes s'installent dans cette saison préhivernale. Ce n'est pas encore la neige et le gel profond, mais les matinées sont fraîches et la gelée est au rendez-vous.
L'animal retrouve dans ces conditions de vie "naturelles" toute sa beauté. Il m'est déjà arrivé de me faire surprendre par un de ces troupeaux sous la neige d'avril.
Taches multicolores sur fond blanc.
Un troupeau d'aurochs ne m'aurait pas surpris davantage. Vision hallucinante !
La cohésion totale de ce groupe rustique surgissant, dans la blancheur, du fond des âges !
Le poil hirsute, les cornes abondantes et déployées, un mâle puissant, des petits bien intégrés…tout était là pour me faire voir l'espace d'un instant ce que pouvait être une horde en liberté…souvenir marquant et inoubliable.
L'hiver l'animal au pré retrouve sa véritable nature. Loin du confort anthropomorphique.
Alors, profitez de ces moments exceptionnels pour regarder différemment ces belles vaches qui sont dans leur élément et qui ne se posent pas la question de leur condition de vie.
Elles sont là, elles vivent leur vie de vache.
Qu'il pleuve, qu'il vente, qu'il neige !

mercredi 9 novembre 2016

La ferme ou "l'organisme agricole": Une vision du futur ?



Ce terme d'organisme nous renvoie à notre organisme, ce qui est organisé. Mais surtout à l'organe qui est vivant. C'est bien de cela que je voudrais parler.
Aujourd'hui, la monoculture ou la spécialisation en matière d'élevage nous éloigne de la ferme d'autrefois où tous les animaux "classiques" se côtoyaient.
On se souvient de "Veau, vache, cochon, couvée" de Perrette et son pot au lait. L'idée même de développement se faisait à travers la diversité des espèces en osmose sur le territoire de la ferme.
Cela relève désormais d'un choix, d'un engagement vis-à-vis de l'idée même que l'on a de sa ferme. Aucun système n'est parfait et il n'est pas dans mon intention de jeter la pierre à qui que ce soit. La réalité du moment que l'on appelle également économique n'est pas une donnée à prendre à la légère. Dont acte.
Pour ceux qui aiment la diversité et qui pensent qu'une ferme doit s'approcher au plus près d'un organisme en équilibre, il convient de proposer quelques images parlantes. Non pas par passéisme, mais plutôt pour redonner à chaque animal sa place dans la cour de la ferme.
Il serait aisé de recourir à nos souvenirs d'enfance, et ce serait un bon début.
Les canards et autres oies, près de la marre où s'abreuvent les ruminants qui rentrent le soir pour la traite, le poulailler bien hermétique qui protège les poules après une journée à gratter la terre aux alentours de la ferme, les cochons qui labourent consciencieusement le jardin de l'année prochaine, etc. Les exemples ne manquent pas.
Ce qui manque parfois aujourd'hui, même dans ces lieux qui essayent de redonner vie à cette continuité animale c'est le sens que l'on donne à la présence de tous ces animaux.
L'interaction entre divers éléments constitutifs d'un tout n'est plus à démontrer, comme le fait qu'un tout est supérieur à la somme de ses constituants.
Ça, c'est la donnée quantitative, mais aussi qualitative. La qualité de l'ensemble réside dans l'interaction des éléments entre eux.
Chacun agit à son niveau, dans sa spécificité puisque c'est la particularité du monde animal. Il est "sur-adapté" pour une tâche, mais parfois très "mauvais" pour une autre.
Donnons-lui alors la possibilité de s'exprimer totalement.
La volaille, par exemple. La poule nous donne des œufs, des poulets, des plumes pour nos édredons et sa carcasse pour une poule au pot du dimanche.
Abnégation de l'animal au service de l'humanité et surtout de son développement. (N'en déplaise aux sans viande).
Mais la poule gratte la terre. Ce qui peut être destructeur au jardin, mais elle ameublit le sol, donc il nous faut du doigté !
Elle gratte, retourne, bine à sa manière l'espace de la ferme. Elle affectionne les lieux où le grain a été déchargé, battu, transporté…elle transformera nos restes alimentaires (on réintroduit des poules en ville pour réduire nos poubelles !), elle fouille le crottin, le retourne, le dynamise, etc.
Bref, elle est utile à la vie, au nettoyage de l'espace.
Mais elle a également un rôle invisible. Elle dynamise l'espace par sa présence et son déplacement, elle fait partit des oiseaux et c'est leur tâche que de faire vibrer l'astral dans notre environnement.
Cela peut paraitre anodin, mais c'est loin de l'être.
Qu'est-ce qui donne de la vie, de la lumière, de la chaleur à notre espace ? Comment tout cela se met-il en route et comment ces différents éléments se trouvent-ils à être répartis dans l'ensemble de cet "organisme agricole" auquel j'ai fait référence au début de cet article ?
C'est bien la collaboration des éléments et des animaux qui vivent sur la ferme qui permet cet échange, cette osmose et l'équilibre général souhaitable.

Enfermez vos poules toute la journée dans un espace confiné, sécurisé certes, et vous passerez à côté d'une richesse qui ne coûte rien, mais qui peut grandement améliorer votre environnement.
Les moutons passaient la tondeuse sur nos talus, les chèvres et les ânes débroussaillaient les chemins sans dépense de gas-oil ni de pollution, les canards régulaient les limaces au jardin et les poules les chenilles.
Les uns finissaient de brouter dans les coins, ou ce que laissait le cheval ou les vaches, tout le monde y trouvait son compte pour la plus grande joie et le bénéfice du paysan.
Le berger ou la bergère remplaçait le fil de fer barbelé… le tracteur n'était qu'un faible "Pony" de 1954 avec un moteur Simca de 16 cv qui équipait les Arondes, et pourtant c'était déjà le déclin annoncé de la traction animale qui allait reléguer le cheval, cet ami de l'homme, au rang d'animal de loisir, mais c'est une autre histoire.

Pas de passéisme ! Juste une idée à méditer de ce que nous avons fait du monde de la ferme. Et dire que la permaculture voudrait nous faire revivre tout cela. Passé ou avenir ?