Ce
terme d'organisme nous renvoie à notre organisme, ce qui est organisé. Mais
surtout à l'organe qui est vivant. C'est bien de cela que je voudrais parler.
Aujourd'hui,
la monoculture ou la spécialisation en matière d'élevage nous éloigne de la
ferme d'autrefois où tous les animaux "classiques" se côtoyaient.
On
se souvient de "Veau, vache, cochon, couvée" de Perrette et son pot au
lait. L'idée même de développement se faisait à travers la diversité des
espèces en osmose sur le territoire de la ferme.
Cela
relève désormais d'un choix, d'un engagement vis-à-vis de l'idée même que l'on
a de sa ferme. Aucun système n'est parfait et il n'est pas dans mon intention
de jeter la pierre à qui que ce soit. La réalité du moment que l'on appelle
également économique n'est pas une donnée à prendre à la légère. Dont acte.
Pour
ceux qui aiment la diversité et qui pensent qu'une ferme doit s'approcher au
plus près d'un organisme en équilibre, il convient de proposer quelques images
parlantes. Non pas par passéisme, mais plutôt pour redonner à chaque animal sa
place dans la cour de la ferme.
Il
serait aisé de recourir à nos souvenirs d'enfance, et ce serait un bon début.
Les
canards et autres oies, près de la marre où s'abreuvent les ruminants qui rentrent
le soir pour la traite, le poulailler bien hermétique qui protège les poules
après une journée à gratter la terre aux alentours de la ferme, les cochons qui
labourent consciencieusement le jardin de l'année prochaine, etc. Les exemples
ne manquent pas.
Ce
qui manque parfois aujourd'hui, même dans ces lieux qui essayent de redonner
vie à cette continuité animale c'est le sens que l'on donne à la présence de
tous ces animaux.
L'interaction
entre divers éléments constitutifs d'un tout n'est plus à démontrer, comme le
fait qu'un tout est supérieur à la somme de ses constituants.
Ça, c'est
la donnée quantitative, mais aussi qualitative. La qualité de l'ensemble réside
dans l'interaction des éléments entre eux.
Chacun
agit à son niveau, dans sa spécificité puisque c'est la particularité du monde
animal. Il est "sur-adapté" pour une tâche, mais parfois très
"mauvais" pour une autre.
Donnons-lui
alors la possibilité de s'exprimer totalement.
La
volaille, par exemple. La poule nous donne des œufs, des poulets, des plumes
pour nos édredons et sa carcasse pour une poule au pot du dimanche.
Abnégation
de l'animal au service de l'humanité et surtout de son développement. (N'en
déplaise aux sans viande).
Mais
la poule gratte la terre. Ce qui peut être destructeur au jardin, mais elle
ameublit le sol, donc il nous faut du doigté !
Elle
gratte, retourne, bine à sa manière l'espace de la ferme. Elle affectionne les
lieux où le grain a été déchargé, battu, transporté…elle transformera nos
restes alimentaires (on réintroduit des poules en ville pour réduire nos
poubelles !), elle fouille le crottin, le retourne, le dynamise, etc.
Bref,
elle est utile à la vie, au nettoyage de l'espace.
Mais
elle a également un rôle invisible. Elle dynamise l'espace par sa présence et
son déplacement, elle fait partit des oiseaux et c'est leur tâche que de faire
vibrer l'astral dans notre environnement.
Cela
peut paraitre anodin, mais c'est loin de l'être.
Qu'est-ce
qui donne de la vie, de la lumière, de la chaleur à notre espace ? Comment tout
cela se met-il en route et comment ces différents éléments se trouvent-ils à
être répartis dans l'ensemble de cet "organisme agricole" auquel j'ai
fait référence au début de cet article ?
C'est
bien la collaboration des éléments et des animaux qui vivent sur la ferme qui
permet cet échange, cette osmose et l'équilibre général souhaitable.
Enfermez
vos poules toute la journée dans un espace confiné, sécurisé certes, et vous
passerez à côté d'une richesse qui ne coûte rien, mais qui peut grandement
améliorer votre environnement.
Les
moutons passaient la tondeuse sur nos talus, les chèvres et les ânes débroussaillaient
les chemins sans dépense de gas-oil ni de pollution, les canards régulaient les
limaces au jardin et les poules les chenilles.
Les
uns finissaient de brouter dans les coins, ou ce que laissait le cheval ou les
vaches, tout le monde y trouvait son compte pour la plus grande joie et le bénéfice
du paysan.
Le
berger ou la bergère remplaçait le fil de fer barbelé… le tracteur n'était
qu'un faible "Pony" de 1954 avec un moteur Simca de 16 cv qui
équipait les Arondes, et pourtant c'était déjà le déclin annoncé de la traction
animale qui allait reléguer le cheval, cet ami de l'homme, au rang d'animal de
loisir, mais c'est une autre histoire.
Pas
de passéisme ! Juste une idée à méditer de ce que nous avons fait du monde de
la ferme. Et dire que la permaculture voudrait nous faire revivre tout cela.
Passé ou avenir ?